Paysages d’Hénin-Carvin : où plonger dans la nature et l’histoire vivante du territoire

14/09/2025

De l’eau aux paysages : la Deûle, ses berges et zones humides

Traversant l’agglomération d’Hénin-Carvin du sud au nord, le canal de la Deûle façonne à lui seul une série de paysages emblématiques, points de repère pour promeneurs, pêcheurs et naturalistes.

  • Le site naturel du Bois du Courant d’Haisnes : Sur l’ancienne plaine inondable canalisée, on retrouve aujourd’hui un corridor de biodiversité, caractérisé par ses saules, peupliers, et prairies humides. Selon des inventaires de la Communauté d’Agglomération Hénin-Carvin (CAHC, 2022), c’est ici que l’on croise parfois le martin-pêcheur, des hérons mais aussi la cistude d’Europe, une tortue rare, revenue grâce à un programme de réintroduction régional (source : Parc naturel Scarpe-Escaut).
  • Les étangs Marotte à Dourges : Ces plans d’eau, issus d’anciennes extractions d’argile, offrent aujourd’hui des points d’observation pour oiseaux migrateurs. En hiver, le fuligule milouin et la sarcelle d’hiver y font étape.
  • Canal et coulée verte de Noyelles-Godault : Cheminant à vélo ou à pied, le regard s’ouvre sur des friches fleuries, refuges pour les papillons Vulcain ou Belle-Dame. Au printemps, les joncs et iris jaunes colorent les berges et attirent libellules et grenouilles.

Outre leur valeur écologique, ces paysages d’eau et de verdure témoignent du lien intime entre hydraulique, industrie et renaturation, cœur du Parc naturel de la Deûle et des Plaine de la Scarpe tout proche.

Reliefs inattendus : terrils, collines vertes et panoramas d’altitude

Point culminant du Pas-de-Calais : à moins de 150 mètres ici, mais quelle vue ! Les terrils, ces montagnes noires héritées de l’extraction minière, structurent de véritables paysages-patrimoines et offrent les plus beaux points de vue du territoire.

  • Terril du 74 à Hénin-Beaumont : Accessible depuis le centre, il déploie un sentier botanique sur lequel on croise, en mai, la rare Ophrys abeille. Sommet aménagé, fauteuils panoramiques et vues sur l’ancien carreau de fosse, le canal et, par beau temps, jusqu’à la forêt de Phalempin. Le terril double du 74 fait presque 60 mètres de haut – un Everest local ! (source : INPN, Observatoire des territoires miniers).
  • Terril Sainte-Henriette à Rouvroy : Ce terril conique a la particularité d’être en partie reforesté, accueillant grands rhinolophes, fauflowers et plus de 80 espèces de coléoptères recensées par le CPIE Chaîne des Terrils. Les zones dégagées servent de points d’observation pour le coucher de soleil sur la communauté urbaine.
  • Collines plantées et revalorisées : Plusieurs anciens dépôts, comme à Montigny-en-Gohelle, sont aujourd’hui des parcs boisés parcourus de sentiers santé.

Ces reliefs démontrent que, même sur un territoire réputé plat, la nature recompose chaque année de nouveaux horizons, où arbres pionniers (bouleaux, robiniers), graminées et petits animaux tirent parti de sols atypiques.

Des forêts urbaines en transition écologique

Moins connues que les grands terrils, les forêts urbaines et périurbaines du secteur constituent des écrins étonnants pour explorer les interactions entre la ville et la nature.

  • Bois de Florimond à Oignies : Rescapé de la pression urbaine, ce bois climatophile abrite un écosystème diversifié. Chênes pédonculés, charmes et une dizaine d’espèces d’oiseaux nicheurs, dont la bondrée apivore, y ont été recensés (source : Observatoire Faune-Flore CAHC, 2021).
  • Parc des Iles à Hénin-Beaumont : Ce gigantesque parc, créé sur d’anciens terrains exploités, témoigne de la résilience écologique du territoire. Plus de 25 hectares de balade au cœur d’un urbanisme renouvelé, alternant pelouses, sous-bois et pièces d’eau. Les écureuils roux et la bergeronnette printanière y sont fréquemment observés.
  • Petites forêts entre Drocourt et Billy-Montigny : Ici, chemin faisant, on traverse d’anciens boisements miniers, dont la faune cryptique (hérissons, musaraignes, chevreuils parfois) surprend les marcheurs matinaux.

Rivières et mégaphorbiaies : la mosaïque végétale locale

Si les terrils et canaux retiennent l’attention, un autre paysage, plus discret, façonne la singularité du territoire : les mégaphorbiaies, ces prairies hautes et humides typiques des bords de cours d’eau.

  • La Souchez entre Estevelles et Courrières : Rivière au régime doux, elle dessine sur son passage des bandes de végétation denses, paradis du cuivré des marais (un papillon menacé en France) et des grenouilles vertes. Cartographiée dans les ZNIEFF (zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique) de la DREAL, elle abrite aussi quelques touffes d’oseille sauvage, espèce rare localement.
  • Prairies mouillées du marais d’Hénin : Entre août et septembre, c’est le domaine des orchidées sauvages, dont plusieurs pieds d’orchis à fleurs lâches (source : Conservatoire botanique national de Bailleul).

Au printemps, ces paysages se couvrent également de salicaires, d’iris et de menthes aquatiques, jouant un rôle majeur de filtre contre les polluants (source : Observatoire de l’Eau Artois-Picardie).

Patrimoine agricole et bocager : autour des villages et plateaux

Pour beaucoup, la plaine agricole paraît uniforme. Pourtant, elle abrite une autre facette iconique du territoire, qui mêle activité humaine et biodiversité.

  • Bocage d’Evin-Malmaison à Leforest : Les haies anciennes, parfois centenaires, accueillent fauvettes, pies-grièches et chauves-souris (source : LPO Pas-de-Calais). Les vergers familiaux conservent des pommes locales comme la ‘Grosse de Leforest’.
  • Chemins de la plaine de Wahagnies : Idéal pour observer la dynamique des cultures céréalières et betteravières, mais aussi les bandes fleuries recentrées pour la pollinisation : bleuet des champs, coquelicot et, aux marges boisées, pic épeiche et blaireau.

Ce type de paysage, en mutation sous la pression d’urbanisation, conserve une valeur forte pour la résilience écologique et la mémoire agricole locale.

Villages patrimoniaux et points d’observation paysagère

La lecture du paysage se fait parfois au détour des villages eux-mêmes, perchés ou établis sur des méandres. Quelques chaînes de points de vue à ne pas manquer :

  • Eglise et place centrale de Courrières : D’ici, panorama ouvert sur la vallée de la Souchez, avec ses filets d’eau, ses peupleraies changeantes. L’hiver, un passage régulier de milliers d’étourneaux en nuées (source : Groupe Ornithologique et Naturaliste).
  • Ancien château d’Hénin-Liétard : Depuis cette butte historique, aperçu des anciennes douves et du maillage de jardins ouvriers, témoins du tissu rural urbain du bassin minier.
  • Boucle verte entre Montigny-en-Gohelle et Oignies : Parcours à pied ou à vélo, avec arrêts sur passerelles au-dessus des sous-bois et vues plongeantes sur l’est de la métropole lilloise.

Saisonnalité et instants “fenêtre” : quand voir le meilleur du territoire ?

Les paysages ne sont pas fixes : chaque saison les réinvente, selon la lumière, la météo, les poussées végétales ou la migration des oiseaux.

  1. Printemps : Éclosion des messicoles (coquelicots, bleuets), chant du bruant jaune dans les friches et fuite des renards à l’aube sur les terrils.
  2. Eté : Friches colorées, massifs d’orties en fleurs, papillons vulcain, libellules chassant sur les mares, pic-nic familial sur les belvédères.
  3. Automne : Panoramas dorés sur le bois de Florimond, départ des hirondelles, affleurement des champignons sur sols acides de terrils.
  4. Hiver : Brumes sur la Deûle et vues lointaines permises par la chute des feuilles ; arrivée du pinson du Nord et du tarin des aulnes.

Les groupes naturalistes locaux (LPO, CPIE, CAHC) proposent d’ailleurs chaque année des sorties à thèmes, accessibles à tous (voir agendas sur leurs sites respectifs).

Lieux emblématiques accessibles, bonnes pratiques et passions partagées

Observer sans (trop) déranger, c’est le principe clé pour profiter durablement de ces paysages. Plusieurs sites sont dotés de parcours balisés, panneaux d’informations, et parfois d’accès PMR (personnes à mobilité réduite) – à vérifier avant visite sur les sites de la CAHC et Tourisme Hénin-Carvin. La majeure partie des terrils restent accessibles gratuitement, sous réserve de respecter la signalétique du moment (travaux, arrêts de chasse, etc.).

Quelques astuces pour améliorer vos observations :

  • Privilégier tôt le matin ou le soir, périodes les plus actives pour la faune.
  • Emporter jumelles et carnet, car nombre d’espèces remarquées l’an dernier ne sont visibles qu’aux yeux attentifs.
  • Signaliser toute espèce exceptionnelle ou blessée aux naturalistes locaux ou à la mairie (ex : hérisson, rapace, tortue relâchée).

Enfin, ces paysages sont vivants par les récits partagés : au fil des ans, anecdotes et souvenirs de riverains complètent la cartographie officielle. Le terril du 74, par exemple, fut le théâtre d’un retour d’orchidées inattendu après une coupe de pins, et un habitant de Montigny rapporte avoir vu la huppe fasciée y nicher pour la première fois depuis des décennies (source : témoignages naturalistes recueillis lors de sorties CAHC 2023).

Invitation à découvrir, transmettre et protéger

La richesse paysagère d’Hénin-Carvin tient ainsi à son histoire mouvementée, à sa capacité d’accueil pour la biodiversité, mais aussi à l’attention portée par chacun à ses trésors discrets. Observer un ciel ouvert sur la plaine depuis un terril, guetter de petits rapaces sur les prairies humides ou simplement marcher sur un chemin de halage silencieux : autant d’expériences à renouveler, seul ou accompagné, pour tisser, site après site, la mémoire vivante du territoire.

En poursuivant la balade, n’hésitez pas à partager vos retours ou à rejoindre une sortie naturaliste. La protection commence toujours par un regard attentif et curieux posé sur ce qui nous entoure.

Sources : Communauté d’Agglomération Hénin-Carvin (CAHC), INPN (Inventaire National du Patrimoine Naturel), CPIE Chaîne des Terrils, Parc Naturel Régional Scarpe-Escaut, Observatoire Faune-Flore CAHC, DREAL Hauts-de-France, LPO Pas-de-Calais, Conservatoire botanique national de Bailleul, Observatoire de l’Eau Artois-Picardie.

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