Émerveillement : la faune et la flore à observer dans les espaces naturels d’Hénin-Carvin

03/10/2025

L’envol des oiseaux : des espèces phares du territoire

Terre de friches et d’étangs, Hénin-Carvin attire chaque année son lot d’ailés. Certaines espèces trouvent ici des conditions favorables quasiment introuvables ailleurs dans les Hauts-de-France. Quelques-unes à ne surtout pas manquer :

Le busard des roseaux (Circus aeruginosus) : spectre des marais

  • Où l’observer : essentiellement sur la Réserve Naturelle Régionale du Marais de la Chaussée-Tirancourt (source) et dans les secteurs de roselières des marais d’Hénin et Billy-Montigny.
  • Période : d’avril à septembre, retour de migration.
  • Fait marquant : ce rapace de grande envergure (jusqu’à 130 cm) construit son nid au ras du sol, dissimulé dans la roselière. On compte à peine 50 couples nicheurs réguliers dans la région (LPO Nord).

La gorgebleue à miroir (Luscinia svecica) : le joyau sonore des marais

  • Où l’observer : sur les berges herbeuses près des étangs d’Hénin, d’Annay et Courrières, notamment à l’aube.
  • Période : migration prénuptiale fin mars, installation en avril pour la reproduction.
  • Anecdote : surnommée le « rossignol du Nord », on la repère par son chant puissant et sa poitrine ornée d’un éclatant miroir bleu vif, unique chez les oiseaux européens.

Le pic noir (Dryocopus martius) : témoin du retour de la forêt

  • Où l’observer : dans les bosquets de feuillus anciens autour de Dourges, Montigny-en-Gohelle et Rouvroy.
  • Signes de présence : tambourinage sur tronc mort, trous de la taille d’un poing dans les troncs peuplés de fourmis.
  • Fait marquant : il était quasiment absent du Nord-Pas-de-Calais il y a 40 ans, son retour signe une amélioration de la maturité forestière locale (OFB, rapport 2022).

Amphibiens et reptiles : entre étangs, fossés et terrils

Les zones humides, mares de décantation et fossés nourrissent une grande diversité d’amphibiens. Plusieurs espèces, parfois rares, trouvent à Hénin-Carvin un refuge inattendu, notamment sur la ceinture des anciens bassins miniers.

  • Triton crêté (Triturus cristatus) : désigné « en danger d’extinction » dans les Hauts-de-France, ce triton atteint 18 cm. Les mâles dévoilent au printemps une crète spectaculaire. Les mares des anciens sites miniers, peu profonds en eau stagnante, sont ses refuges principaux (Atlas Biodiversité du Pas-de-Calais, 2021).
  • Grenouille rousse (Rana temporaria) : active dès février, elle investit les mares froides et peu profondes. Sa ponte en masse (une seule femelle peut pondre jusqu’à 4000 œufs !) annonce l’explosion de vie après l’hiver.
  • Couleuvre à collier (Natrix natrix) : serpent inoffensif, repérable sur les berges ensoleillées des canaux et fossés du bois de Florent ou du terril 94 à Rouvroy. Anecdote : Pour se défendre, elle simule parfois la mort, bouche ouverte et langue pendante !

Mammifères : la discrétion comme maître-mot

Le Pas-de-Calais brinquebale une histoire industrielle qui a façonné des corridors nouveaux pour les petits et grands mammifères. Si les chevreuils investissent facilement les lisières des parcs boisés du secteur, d’autres espèces, plus discrètes, intriguent par leur adaptation.

  • Renard roux (Vulpes vulpes) :
    • Très présent sur les friches et bords de terrils.
    • Le soir, il s’aventure jusque dans les zones pavillonnaires pour se nourrir des invertébrés du compost ou des petits rongeurs, jouant un rôle clé dans la régulation naturelle des populations de proies (INPN).
  • Lapin de garenne (Oryctolagus cuniculus) :
    • Réintroduit par endroits à la fin du XXe siècle après le déclin de la myxomatose.
    • On estime que sur certaines buttes de terril, il y a parfois près de 20 terriers pour 100 mètres linéaires sur quelques secteurs !
  • Pipistrelle commune (Pipistrellus pipistrellus) :
    • Chauves-souris minuscule, elle survole les étangs d’Hénin ou de Dourges dès le crépuscule.
    • Une colonie peut consommer jusqu’à 3 000 insectes nocturnes par nuit et par individu, rôle fondamental pour diminuer les nuisances de moustiques l’été (Muséum National d’Histoire Naturelle).

Plantes remarquables et populations végétales rares

La requalification écologique des anciens sites industriels, associée à la protection de quelques prairies et zones humides, dévoile des cortèges végétaux locaux à haute valeur patrimoniale. Certains sont liés à la présence de substrats pauvres en nutriments ou riches en éléments issus du charbon.

  • Orchidée abeille (Ophrys apifera) :
    • Étonnamment fréquente sur les talus sud des terrils d’Hénin et d’Oignies.
    • Pollinisée par le mimétisme : sa fleur imite une abeille femelle, attirant ainsi les insectes mâles.
    • Présence multipliée par 5 dans la région au cours des deux dernières décennies grâce à l’abandon de l’usage systématique d’herbicides (Flore Nord-Pas-de-Calais, 2022).
  • Scirpe maritime (Bolboschoenus maritimus) :
    • Touffes denses présentes sur les bordures saumâtres de la Deûle et des marais à Annay-sous-Lens.
    • Indicateur d’eau temporairement salée, ce qui souligne l’héritage minier des eaux infiltrées chargées en ions (BRGM, 2017).
  • Élyme des sables (Leymus arenarius) :
    • Réimplanté sur certains sites de reconversion pour stabiliser les sols.
    • Permet le retour progressif d’une flore rivulaire et d’oiseaux fouisseurs.

Espèces sous surveillance et menaces

Même si la région reste un foyer de biodiversité inattendu, certaines espèces en danger sont particulièrement surveillées par les équipes locales et les réseaux associatifs :

  • Crapaud calamite (Epidalea calamita) : dépend des mares éphémères qui se raréfient, victime du drainage et des ruissellements agricoles.
  • Butor étoilé (Botaurus stellaris) : un héron rare, observable par chance en hiver, dont la population européenne a chuté de 50 % en 40 ans (BirdLife International, 2021).
  • Lézard vivipare (Zootoca vivipara) : isolé dans les zones les mieux restaurées de la ceinture charbonnière, très sensible au piétinement.

Conseils d’observation et initiatives locales

  • Privilégier les sorties tôt le matin ou à la tombée du jour pour maximiser les rencontres.
  • Munissez-vous de jumelles et d’un carnet de terrain pour noter vos observations. Les observatoires publics d’Annay ou du bois de Florent sont des points de départ privilégiés.
  • Favoriser les sentiers balisés, réduisant l’impact sur les zones sensibles.
  • Rejoindre les animations nature de structures telles que Eden 62, la Maison de l’Environnement ou les groupes locaux de la LPO.
  • Contribuer à la science participative via des applis comme INaturalist ou Faune-France pour recenser vos trouvailles.

Un territoire vivant, entre mémoire industrielle et retour du sauvage

Observer la biodiversité à Hénin-Carvin, c’est mêler l’histoire du charbon à la trame verte d’aujourd’hui. Chaque terril reboisé, chaque mare préservée offre un terrain d’étude et d’émerveillement pour les générations à venir. Un patrimoine vivant qui se reconstruit, et dont la richesse se révèle à qui prend le temps d’affûter son regard. L’avenir des espèces locales dépendra de notre curiosité et du respect des fragiles équilibres, tout autant que de nos engagements collectifs en faveur de leur préservation.

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