Franchir la nature, la préserver : Mode d’emploi pour profiter sereinement des espaces naturels

07/10/2025

Pourquoi tant de précautions pour ces espaces ?

Chaque espace naturel est unique. Qu'il s'agisse du marais de Wagnonville, des terrils de Noyelles-Godault ou d’une simple haie bocagère, ils accueillent une faune et une flore souvent fragiles, parfois endémiques ou en danger. Le réseau Natura 2000 recense, en France, 1 753 sites terrestres (INPN, 2023), et la région Hauts-de-France abrite à elle seule près de 17 % des espèces patrimoniales végétales nationales (Observatoire Biodiversité HDF). Mais cette richesse s’étiole : 17 % des habitats naturels sont en « état de conservation favorable » seulement.

Presque partout, l’impact de nos passages – même discrets – pèse sur la reconquête des écosystèmes. Or, ce sont nos comportements de visiteurs qui font la différence entre une balade responsable et une intrusion dommageable, parfois irréversible.

Comment trouver l’accès « juste » aux espaces naturels ?

Certains espaces sont librement accessibles, d’autres non : la carte d’accès peut sembler complexe, mais quelques repères simplifient la découverte, dans les règles de l’art… et du vivant.

  • Parcs urbains, sentiers balisés, réserves : Ici, un balisage clair, des panneaux d’information, des itinéraires identifiés facilitent la circulation. C'est le cas du parc des Îles à Hénin-Beaumont, conçu pour recevoir la promenade tout en guidant le public.
  • Espaces protégés, réserves naturelles, sites Natura 2000 : L’accès peut être réglementé voire interdit temporairement (nichées, chantiers de restauration, fragilité des milieux). Les arrêtés municipaux ou préfectoraux, affichés en mairie ou sur site, font foi.
  • Terrains semi-naturels, terrains privés : Beaucoup de friches, bois ou lisières appartiennent à des particuliers, aux communes, à l’État ou à des industriels (ex : anciens sites miniers). Sans accord ou sentier clairement ouvert, mieux vaut s’abstenir d’entrer.
  • Zones humides et plans d’eau : Au Sud du territoire, marais, mares et fossés hébergent amphibiens et oiseaux nicheurs. Certaines zones sensibles sont interdites d’accès lors de la nidification (de février à juillet, par exemple), comme autour des étangs de la Houlle.

Le meilleur réflexe ? Consulter les informations locales : sites web des collectivités, offices de tourisme, conservatoires d’espaces naturels (CEN Hauts-de-France). Des cartes interactives existent aussi, comme le Géoportail du CEN.

Les principes à suivre pour être un visiteur bienvenu

L’éthique du promeneur va bien au-delà du simple « je ne jette pas mes papiers ». Elle s’enrichit de gestes, parfois simples, mais essentiels.

  • Rester sur les sentiers tracés : Dans une prairie de 1 ha, un sentier de 1 m de large peut impacter jusqu’à 5 % de la surface utile pour les insectes et petits mammifères (source : CNRS – Le Journal du CNRS, 2021). Errer hors-piste, c’est tasser les sols, déranger la faune et favoriser l’invasion d’espèces étrangères.
  • Limiter le bruit et la lumière : Un simple cri ou une lampe de poche la nuit peuvent suffire à interrompre l’alimentation d’une chouette chevêche ou la reproduction de tritons (ONF, 2022).
  • Laisser ce qui vit à sa place : Cueillir fleurs et champignons impacte parfois lourdement les populations locales. Sur le terril de Pinchonvalles, la cueillette non réglementée de l’orchis bouc () a fait baisser de 30 % les stations en dix ans.
  • Ramener tous ses déchets : 80 % des déchets retrouvés dans les milieux naturels français proviennent des activités humaines récréatives (source : ADEME, 2022).
  • Observer à distance : Utiliser jumelles ou appareils photo plutôt qu’approcher ou toucher – déranger, même sans le vouloir, c’est parfois menacer un cycle entier (ex : abandon de nichée chez les oiseaux limicoles).
  • Chiens en laisse : En période de reproduction (mars-juillet) ou sur site sensible, le chien en liberté peut détruire un nid au sol ou causer la fuite d’un faon de chevreuil.

Fréquentation : adopter la bonne mesure

Le saviez-vous ? Entre 2010 et 2022, la fréquentation des espaces naturels périurbains a augmenté de près de 40 % en France (INEE-CNRS). Or, la surfréquentation, même sans actes de vandalisme, suffit à bouleverser la quiétude et la dynamique naturelle d’un site.

  • Pourquoi limiter les groupes ? Un groupe de 20 personnes qui marche en file indienne occupe cinq fois plus l’espace qu’un petit groupe de quatre. Cela multiplie le piétinement, la fragmentation, les bruits.
  • Modérer les heures d’affluence : Certains sites, sur-fréquentés en week-end, retrouvent leur calme en semaine ou en matinée. Pour profiter du lieu sans le surcharger, rien de tel que d’anticiper ou de choisir des horaires moins prisés.

Des exemples concrets dans le territoire

  • À la découverte des terrils rénovés… La communauté d’agglomération Hénin-Carvin a restauré plusieurs buttes minières, comme celles de Drocourt, en créant des parcours pédagogiques sur pilotis : on découvre la biodiversité exceptionnelle des sols noirs, sans piétiner les prairies précieuses (CaHC).
  • Observatoires ornithologiques de la Houlle : Plateformes sur pilotis, ouverture sur certaines plages horaires seulement, posage à distance pour les observateurs : le compromis parfait pour savourer la migration sans bousculer martin-pêcheur ou tarier pâtre.
  • Randonnée sur la Scarpe : Les nouveaux canoës labellisés ENS (Espace Naturel Sensible) encadrent nombre de balades : pas de sorties libres en période de ponte, explications fournies avant accès, itinéraire balisé… La pédagogie en action.

Quels risques en cas de non-respect ?

  • Menace sur les espèces : 42 % des oiseaux de plaine sont en déclin sur les 30 dernières années dans les Hauts-de-France (MNHN-LPO, Suivi temporel des oiseaux communs).
  • Sanctions : Outre les conséquences écologiques, sanctions financières possibles (de 68 à 1 500 € d’amende selon les délits) pour violation des règles d’accès ou destruction de flore/faune protégée (code de l’environnement, art. L415-3 : Legifrance).
  • Perte collective : Un espace détérioré est parfois fermé au public : ce fut le cas de plusieurs sentiers sur le terril Sainte-Henriette, inaccessibles deux ans suite à dégradations majeures (source : Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin).

Des ressources et acteurs locaux à solliciter

  • Conservatoire d’Espaces naturels Hauts-de-France : Propose visites guidées, chantiers nature, accompagnement des collectivités et particuliers (voir l’agenda).
  • Associations de protection et clubs nature (GON, LPO, Les Blongios…) : Recensent observations, organisent sorties encadrées – l’occasion d’apprendre en direct les bonnes pratiques.
  • Communes et intercommunalités : Beaucoup éditent des cartographies actualisées, proposent des formations (sensibilisation des élus et des écoles).

Vers une nouvelle alliance avec les espaces naturels

Finalement, accéder et respecter les espaces naturels, ce n’est pas obéir à des règles arbitraires : c’est prendre part à une alliance délicate entre humains et vivants, où chaque choix de trajet, chaque geste de retenue, chaque appel des jumelles compte. Nos balades d’aujourd’hui dessinent la nature de demain – et c’est ensemble, résidents et visiteurs, que nous pouvons la préserver, la comprendre… puis, pourquoi pas, en devenir les ambassadeurs.

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